TROIS APPROCHES DU LANGAGE DE L’ÉMOTION

TROIS APPROCHES DU LANGAGE DE L’ÉMOTION

 

Les définitions de caractère encyclopédique données par les psychologues et les psychiatres, plus ou moins passées dans le sens commun (à moins que ce ne soit l’inverse), ont été adoptées par les linguistes. Au titre du “sentiment linguistique”, propriété inaliénable du locuteur idéal, elles influencent profondément par exemple les recherches sur ce qu’il faut entendre par terme d’émotion. La délimitation de ce champ met en jeu non seulement les termes désignant d’abord des états psychiques, mais aussi des termes désignant les accompagnements organiques ou actionnels de ces états (voir infra).

D’une façon générale, et dans la perspective d’une analyse du langage et de la parole émue, on pourrait proposer de grands regroupements autour des trois pôles suivants, le pôle expressif-énonciatif, le pôle pragmatique, le pôle communicationnel ou interactionnel, aucun ne bénéficiant d’un privilège particulier. Par une série d’intégrations successives.

Pôle expressif-énonciatif

On s’intéresse ici essentiellement à l’état affectif du sujet ému, à son état cognitif (ses perceptions, ses évaluations), tels qu’on peut les lire dans ou les inférer de son activité verbale, ainsi qu’aux transformations de ses “Gestalten” vocales et mimo-posturo-gestuelles. Par exemple, on détermine les caractéristiques de la voix triste ou de la voix de la colère.

Pôle pragmatique

Pôle pragmatique. La pragmatique de l’expression émotionnelle prend en compte la situation, c’est-à-dire l’événement inducteur et les transformations élémentaires des dispositions à l’action du locuteur. Interviennent systématiquement à ce niveau les émotions liées à des situations et à des rôles, la prise en charge d’un rôle (discursif ou social) avec la posture émotionnelle ad hoc.

Pôle communicationnel-interactionnel

On s’intéressera alors au rapport de voix entre la voix du colérique et la voix du calme ou du colérique complémentaire avec laquelle il interagit (Grosjean 1995) ; à l’émergence de l’émotion à partir de ce stimulus particulier que constitue l’être conversationnel de l’autre ; à son évolution et à sa gestion dans l’interaction (voir Plantin, Doury, Traverso 2000).

Cette étude devrait rester attentif au fait qu’étudier l’émotion dans les interactions, c’est se donner comme objet le tout de la communication interpersonnelle, qui intéresse notamment la psychanalyse, le psychosociologie des groupes, la psychologie en général et la psychologie clinique (Sangsue & Scherer 2000).